Bronner
est universitaire et sociologue, mais il écrit aussi des polars, dont le dernier s’intitule « Comment je suis devenu super-héros ? ».Au croisement du polar et des comics, il y met en scène Titan, un super-héros new-yorkais. Titan n’est pas au mieux. Sa femme l’a plaqué, et il a perdu une place au top 30 des super-héros les plus populaires. En plus de ces tuiles, il va devoir combattre un terrible méchant, le Vampire de New-York. Ses cibles sont les super-héros, et notre cher Titan semble bel et bien être le prochain sur sa liste.
Le sujet est potentiellement très intéressant, et plutôt original. Le problème, c’est que l’auteur se prend les pieds dans le tapis. On a l’impression qu’il cherche à jouer sur plusieurs tableaux à la fois, tantôt l’humour, tantôt l’intimisme, tantôt la noirceur. Titan est certes un personnage attachant, avec ses fêlures, ses doutes, ses forces et ses faiblesses. Mais au lieu d’en faire un personnage complexe, il empile ses facettes par couches successives au fil des pages. Le coté humain et complexe se trouve ainsi réduit à un catalogue d’émotions et d’attitudes que l’on feuillette au fil du roman comme le premier catalogue venu. Pour ce qui est de l’humour, on rit un peu au début du livre. Le coté intime de Titan est la partie la plus réussie du roman, centrée sur son enfance, l’échec conjugal et ses relations avec le super-héros Gigaman.
Une fois le héros présenté, l’auteur lance ses rebondissements comme autant de fusées éclairantes, au fur et à mesure que l’intrigue sombre corps et biens dans l’ennui. Le coté noir est complètement raté, car l’auteur parle énormément pour ne pas dire grand-chose. A l’instar des facettes de Titan, les péripéties du roman s’empilent les unes sur les autres, dans un crescendo de longueurs et délayages. C’est bien simple : Bujold passe ici pour un modèle de concision !
Le polar est une littérature complexe et exigeante, et il ne suffit pas de lire Dennis Lehane ou Ken Bruen pour signer un bon roman. L’intrigue n’est absolument pas maitrisée ni aboutie, et laisse la désagréable impression d’une improvisation permanente. Mais que vais-je pouvoir dire pour écrire un nouveau chapitre ? Cette question lancinante semble être le désagréable leitmotiv du roman… voire sa seule véritable intrigue.
Et c’est bien dommage, car le roman n’est pourtant pas mauvais. On y trouve une grande acuité sociologique. L’auteur fait mouche quand il pointe la banalisation de la violence. Ou bien la starification à l’époque où les journaux publient 200 articles quotidiens sur Paris Hilton. Ses réflexions sur les super-héros comme stéréotypes culturels américains sont également pleines de pertinence. Cela mis à part, c’est tout simplement raté et ennuyeux. C’est donc avec amertume et lassitude que l’on referme ce livre. De bonnes idées ont été bêtement gâchées dans un roman, là où une nouvelle et un article auraient suffit. Lisez plutôt « American gods » de Neil Gaiman, mais surtout Jean-Bernard Pouy, chez le même éditeur : vive Poupou !!!