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Un feuilleton en mini-albums d’une trentaine de pages, couverture couleur agrafée, au format A5 (14.5 x 21 cm) en noir et blanc ; le tout plutôt bien fait et pour pas cher du tout : 1 € l’album ! ! imbattable pour une œuvre de première sortie et un beau pari pour l’éditeur. Ce feuilleton est à mi-chemin entre le livre et la revue, et sa périodicité est mensuelle. Actuellement 5 albums sont disponibles sur les 12 prévus pour la première saison.
Les auteurs avouent s’inspirer de l’esprit des séries télé, épisodes à suivre, saisons, etc. et revendiquent le côté " aventure foutraque " sans plus grande ambition que celle (je cite Gabus) " de la rondelle de saucisson au moment de l’apéro ou de l’éclair au chocolat dans la devanture du pâtissier " : à savoir divertir, un petit plaisir mensuel de lecteur .
Sur le fond, la Bd est plus ambitieuse que ça et vise à décrire une ville tentaculaire en décrépitude : corruption, délabrement des services, mafia, etc. mais sous un mode semi-humoristique qui cherche à briser les codes classiques de l’aventure : héros, mission, sauver le monde, traître, etc. Ici l’intrigue part dans tous les sens ou plutôt dans le sens de ses personnages : un éléphant anarchiste qui se planque pour faire pousser de mystérieuses graines, un rongeur journaliste qui consulte les voyants, un super héros invincible mais à la solde du maître de la ville, une chienne raffinée qui ne parvient pas à séduire l’éléphant, etc.… L’ensemble réussit à travers ces personnages bien campés à définir un univers complexe très personnel, proche du New-York des années 30, mais dans lequel on se déplacerait en montgolfière (en prenant le risque de la voir crever par des soucoupes volantes !), au milieu d’une foule mixte d’extra-terrestres, d’animaux bipèdes et d’humains.
En terre Franco-belge, les tentatives d’imitation des manga ou des comics ont toujours échoués justement parce qu’elles faisaient de la copie, c’est la première tentative que je vois réussir (formellement) parce que justement elle tente une forme particulière, locale, et originale de BD bon marché grand public : on essaie pas de faire du Sangoku ou du Captain America, mais une BD inspirée du feuilleton romanesque d’autrefois, et des meilleurs BD de chez nous : de Chlorophylle à Sfar, de Tintin à Winschluss. Le tout dans une simplicité de trait qui n’a pour ambition que de servir le récit ; léger, aéré et dynamique.
La série est en cours et la prise de risque est minimum (1 ou 2 €) pour un essai, personnellement je cède au plaisir du feuilleton, ça fait longtemps que j’attendais une initiative de ce genre : sortir des formats pré-contraints, sortir de la Bd intimidante de collectionneur, remettre la Bd dans la rue, revenir à un art pour petit porte-monnaie, c’est l’essence de la BD – art populaire par excellence.
Ne boudons pas notre plaisir. Vite avant que la série ne se termine.
