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fabieng

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Jacques Tardi

Le Démon des Glaces


Le Démon des Glaces
 Pour la présente édition :

Editeur : Casterman

La critique du livre
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Le Démon des Glaces de Tardi

Pour l’historique, le « Démon des glaces » est le troisième album de Jacques Tardi, il est paru en 1974 chez Casterman : c’est un grand album à l’origine de 29,9 cm par 39,8 cm. Les dimensions ont une grande importance car elles amplifient et servent cette merveilleuse œuvre « d’enluminure », de gravure pour être précis, inspirée des Romans de Verne et Hetzel, et des gravures de Gustave Doré. C’est un album « à la manière de », nostalgique et admiratif des maîtres de l’illustration d’autrefois. L’ensemble est réalisé à la carte à gratter, technique très spectaculaire : le dessinateur enlève les noirs par grattage, alors qu’habituellement il les ajoute à la plume (dans un autre registre que la SF, allez voir les dessins de Thomas Ott à la carte à gratter). Une technique extrêmement pénible, que Tardi jure de ne plus jamais utilisé après cet album ! Mais le résultat est assez incroyable. C’est donc tout ? un magnifique album de nostalgie, illustré « à l’ancienne » ?

Of course not ! Car Tardi est un petit malin, très irrévérencieux : et son irrévérence donne à l’ensemble un ton moderne et acide, essentiellement grâce à son goût immodéré pour les personnages à « tronche impossible », aux regards troubles, vicelards. L’histoire n’a finalement que peu d’importance, elle n’est que l’occasion d’une déambulation à travers des lieux improbables, sous la férule de guides cinglés : superbes voiliers de bois pris dans les glaces, maisons de banlieues, caves sordides pleines de machineries, cimetières parisiens, cimetières sous-marins, gares métalliques, trains à vapeur, pour finir dans les entrailles rouillées d’un Nautilus vertical.

Ce livre est ainsi très représentatif d’une grande partie de l’œuvre de Tardi . L’auteur est surtout connu pour son obsession pour la guerre de 14-18, avec des albums « de fond » comme « La fleur au fusil » ou « la guerre des tranchées » ; il y tente de dénoncer l’horreur de la guerre, s’interrogeant aussi sur la pertinence de la BD (et sa réputation d’art comique) pour une telle dénonciation (ceux qui connaissent savent qu’il y excelle). L’autre facette de son œuvre donc, de Adèle Blanc-sec à Nestor Burma, est justement celle en jeu dans le « Démon des glaces » : l’art du décor, l’art de se promener dans le décor. On l’a dit l’histoire, même si elle est savoureuse (un iceberg métallique construit par des savants fous veut détruire le monde), n’est qu’un prétexte à l’errance dans un immense et infini décor ; pas un décor, au sens de décoration comme on l’utilise généralement en BD, mais un décor comme une architecture monumentale. Un décor vivant, en mouvement, une créature construite à l’image de son nautilus-iceberg : une machinerie de théâtre en somme, qu’on pourrait explorer sous toutes les coutures, depuis la scène, depuis les coulisses, depuis les loges, etc.

C’est la grande réussite de cette BD, réussir à plonger le lecteur dans un véritable ailleurs, cohérent, vivant, et riche ; une réussite finalement assez rare en BD (assez proche de ce qu’essaient Schuitten et Peeters, en plus sérieux, dans les « Cités Obscures ») ; bizarrement rare car c’est justement le talent de cet art que de pouvoir montrer des images par le lien du récit, un talent idéal pour raconter l’architecture, la ville, le « lieu ». Tardi le laisse largement entendre dans le « Démon des glaces » il est là pour faire le travail de l’architecte, plans, coupes, détails techniques à l’appui : décrire un bâtiment, non seulement dans ses caractéristiques construites (dimensions, fonctionnement) mais aussi dans son imaginaire (l’art d’habiter un bâtiment, l’art de lui donner une âme). Tardi continuera cette idée par la suite, en dehors de la SF, essentiellement pour décrire la ville, Paris aujourd’hui, dans les années 50, au XIXéme siècle ; le dessinateur décrira la banlieue ordinaire, à un tel niveau qu’il existe maintenant un Paris selon Tardi. Toujours avec l’idée que l’histoire sert à montrer des lieus, à se promener.




Pour en savoir plus sur Tardi, le mieux c'est d'aller faire un tour chez son éditeur, Casterman :
http://bd.casterman.com/bio/TardiJa


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