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Gui

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Massimo Rotundo (dessin), Ricardo Barreiro (scénario)

Le Pêcheur de Brooklyn


Le Pêcheur de Brooklyn
Traduction : Antoine Roux
 Pour la présente édition :

Editeur : Glénat
Date de parution : mars 1984
Nombre de pages : 46
ISBN : 2-7234-0436-6

La critique du livre
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Planche intérieure
Planche intérieure
New York marquée au fer rouge par un attentat terroriste. Revendications de groupuscules d’extrême gauche adeptes de la matière forte placardées sur les murs. Ultra-violence urbaine. Caméras de vidéosurveillance dans tous les coins. Faune et flore naturelles rendues folles par les résidus industriels. Omniprésence des SDF et des mendiants. Entrées d’immeubles ultra-sécurisées et portes d’appartements blindées. Collégiens qui se bourrent de cachetons dès le réveil et qui révisent leurs cours en fumant des joints. Représentants de la force publique armés de fusils d’assaut dans les rues. Banalisation du cybersexe. Publicités et réclames sur toutes les surfaces possibles. Généralisation des dopants médicaux. Soldats faisant le boulot de la police. Grandes enseignes de l’alimentation se fournissant au marché noir. Et surtout, aucune voie de sortie…

Ne me dites pas que ça ne vous rappelle rien, il n’est même plus nécessaire d’allumer la télé pour voir ce genre de choses : il suffit de se balader dans la rue. Ou presque…

Ce qui frappe dans Le Pêcheur…, c’est de voir comme les « prédictions » se sont avérées juste. J’utilise des guillemets car il ne s’agit pas exactement de prédictions, mais plutôt – je crois – de l’extrapolation de certaines tendances déjà discernables à l’époque où les deux auteurs ont créé cette BD, et qui du reste se trouvaient déjà plus ou moins présentes dans la science-fiction depuis une bonne quinzaine d’années – ce que les créateurs de cette œuvre savaient certainement puisqu’ils font preuve d’une assez bonne connaissance du genre ; voir les notes en fin de critique pour plus de détails. On retrouve ici tout le sens de l’exagération propre à l’époque – qui marque un net triomphe de la pub, c’est-à-dire de l’image – mais surtout sa froideur et son pessimisme ce qui, pour le coup, fait ressembler cette BD aux cyberpunks c’est-à-dire une inspiration tout à fait dans l’air du temps au contraire de celle des œuvres plus anciennes déjà évoquées.

Mais la représentation est ici beaucoup plus moderne dans la facture que celle des productions littéraires issues d'une inspiration comparable, c’est-à-dire à la fois plus juste et plus palpable ; bref, plus crédible. Peut-être parce que sa création a bénéficié de plus de recul que celle qu’avait à leur disposition les écrivains des productions de 15 ans les aînées de celle-ci, ou bien parce que les auteurs de cette BD connaissent leur affaire, tout simplement : j’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer, dans un autre endroit, sur cette inspiration propre aux artistes et qui leur permet parfois de toucher la réalité – au moins du bout des doigts – sans que leur méthode de travail repose pour autant sur des chiffres ou tout autre moyen considéré comme bien plus rationnel que ceux des tripes et du cœur.

Bien sûr, c’est une BD et beaucoup des éléments présentés dans cette œuvre en particulier s’avèrent encore de nos jours pour le moins exagérés – comme l’époque du récit par exemple : les choses n’étaient pas si graves que ça il y a 13 ans, pas encore en tous cas. C’est un autre corollaire de la production artistique, et pas forcément plus fâcheux d’ailleurs. Mais le but des auteurs n’étaient probablement pas ici de faire une prédiction exacte, juste de dire que les choses allaient de plus en plus mal et qu’elle finiraient par nous exploser à la figure bien plus tôt qu’on pouvait le croire à l’époque. J’imagine en tous cas que c’était leur intention.

Évidemment, personne ne les a cru, pas plus que leurs confrères – sur le média de la narration graphique ou n’importe quel autre – qui dénonçaient déjà des excès semblables : la BD n’a rien de sérieux, c’est bien connu. Et puis ce n’était pas dans l’air de ce temps où le faste, le somptueux et le monumental régnaient en maîtres – en occultant du même coup tous les crève-la-faims qui du reste commençaient à peine à s’amonceler et demeuraient encore discrets. Ces excès ont enfin montré leur revers, la récente actualité économique en ayant fait la parfaite démonstration : beaucoup l’avaient vu venir, qu’on avait voulu faire passer pour des fous tant leur discours gênait…

Le Pêcheur… fait partie de ces BD comme on en voit plus assez. Noyée dans la fantasy ou assimilés, la cyber-culture racoleuse et ses pseudo-métaphysiques, ou encore le space opera qui au fond ne se différencie pas vraiment du premier des genres cités dans cette phrase, la BD est devenue un produit de consommation de masse dont le seul but ne consiste plus qu’à distraire – et les conseils d’administration des grandes entreprises savent bien qu’il ne faut surtout pas faire réfléchir les masses, beaucoup pensent qu’elles en sont incapables d’ailleurs.

On trouve quelques chefs-d’œuvre néanmoins, et d’autres arriveront leur moment venu. Si Le Pêcheur… n’en fait pas partie, il a au moins le mérite de rester d’actualité, même plus de 25 ans après sa parution. Ce qui est certainement bien plus que la plupart des productions actuelles dans le domaine de la narration graphique… et des autres.

Notes :

À la planche 16, l’enseigne de l’immeuble de la compagnie où travaille Alex mentionne le nom de HAL, ce qui est bien sûr un hommage à 2001, l’Odyssée de l’espace ; en dessous, le texte « Multivac – Computers – Inc » est un autre clin d’œil, mais à Isaac Asimov dont nombre de textes mettent en scène un super-ordinateur du nom de Multivac.

Le souci du détail qui caractérise les graphismes de cette production occupera pendant longtemps les lecteurs attentifs : ils y trouveront de nombreuses informations sur le monde futur de cette histoire.

L’existence d’alligators dans les égouts de New York est une légende urbaine qui date du milieu des années 70 à peu près.




1997 : Pour arrondir son salaire de misère, Alex doit se battre jusqu’au sang contre les nouveaux monstres qui habitent le marais de Long Island et les rues de New York, dans la fièvre d’un monde fou.


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