Le cycle de Darwath enfin traduit, grâce en soit rendue à l'éditeur : Les forces de la nuit, Les Murs des ténèbres et Les armées du jour constituent les trois parties de ce récit de 652 pages
Ce cycle, je l'avais beaucoup aimé dans sa version VO en 1983. Il s’en est donc passé du temps et j’avais un peu peur d’être trahie par des souvenirs embellis par la nostalgie et déçue une fois de plus par la traduction…
Un conseil : Ne vous laissez pas intimidés par la soi disante longueur du récit ni par son sujet - J’entends le cri de Franz QUOI de LA FANTASiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii ? j'entends d'ici les ricanements des puristes, les fidèles du SDA : encore un magicien avec barbe et bâton : pâle copie de Gandalf ! Oui, Ingold possède une barbe blanche, des sourcils broussailleux et un bâton ainsi qu'une épée dont il sait brillamment se servir comme de son solide bon sens Heureusement d'ailleurs pour Darwath.
Mais à mes yeux, la véritable héroïne est une femme : Gil Patterson, étudiante, solitaire, entraînée, avec un jeune artiste biker marginal, Rudy, dans un monde parallèle qui subit pour la deuxième fois de son histoire l’attaque des Ténébreux . Pas le meilleur moment pour y débarquer, pas vrai ?
La civilisation qui a atteint un niveau équivalent au haut moyen âge, jusqu’à là florissante s’effondre et la population plonge dans l’enfer de la survie. Les pouvoirs politique et religieux se disputent sans comprendre réellement le danger d’extinction qui les menace.
Gil en historienne essaie d’analyser les évènements et d’apporter à Ingold (mage et conseiller des puissants) son soutien pour sauver ce qui peut encore l’être.
Le personnage de Rudy bien que sympathique ne joue pas un rôle essentiel mais permet à l’auteur de donner une autre vision plus réaliste et terre à terre de la situation.
Pour nos deux terriens, la question est : vont-ils survivre jusqu’à ce qu’ils puissent rentrer chez eux ? pourront ils s’adapter ? ce monde va-t-il les révéler ou les briser ?
Bien entendu, il y a là également des combats, des conflits personnels, de la magie, de l’amour et de la haine tous les ingrédients nécessaires pour ne pas lasser le lecteur. Des ingrédients pour une fois habilement entremêlés au récit de la disparition sans espoir d’une civilisation et de la terrifiante réapparition de ces ET dont on ne sait à peu près rien sinon qu’ils sont mortels pour l'homme et pratiquement invincibles.
Certaines pages sont terrifiantes de réalisme : l'abandon de tout un groupe de survivants aux Ténèbres et à la faim, la pitoyable malignité de la dignitaire religieuse...
AMA, c’est une excellente histoire avec une multitude de personnages tous plus vrais les uns que les autres dans leurs aspirations et leurs réactions face à un destin sombre et sans espoir.
Même si personnellement - je crois l'avoir déjà dit sur le forum - la deuxième partie sur la cité de QUO (voyage initiatique de Rudy) plus essentiellement fantaisie n'était pas indispensable dans sa longueur, pour l'intérêt du récit . Mais il s'agit là encore de mon goût personnel et certains verront dans l'arrivée à Quo des scènes intéressantes et nécessaires à la prise de conscience de Rudy.
Cependant, le lecteur exigeant pourrait reprocher à l'auteur un manque d'originalité (Darwath c'est vraiment la terre et on retrouve sans peine certaines références dans l'histoire de l'Europe) mais qu'importe !l'écriture étant toujours aussi passionnante et efficace tandis que l'histoire reste habillement construite pour faire monter la pression
Un autre atout : l'absence de surhomme véritable dans cette aventure même Ingold n’est pas un mage tout puissant ni parfait.
Et enfin, pour l'estocade finale : pour une fois, la fin est une vraie surprise même pour un lecteur avisé.
Si je me suis décidée à écrire cette chronique c’est que c’est un bel exemple de ce que devrait être la fantasy. Une lecture distrayante certes mais surtout un récit construit et solide et des personnages crédibles placés dans des situations où seule la magie peut apporter soit la solution soit le piment nécessaire à nous tenir en haleine jusqu'au final.