Knight
est absent des collections de sf récentes en France. Ce qui être vu comme une injustice au regard de sa place centrale dans la science-fiction américaine. Critique de renom, éditeur de la revue Orbit, anthologiste (on lui doit notamment 13 french sf stories), ces activités périphériques font quelque peu ombrage à sa production fictionnelle, où dominent les nouvelles, petits joyaux d'humour grinçant.Le pavé de l'enfer est son premier roman et compte, dit-on, parmi ses meilleurs.
On y découvre un monde, dans un futur proche, où l'un des plus grands rêves de l'homme de paix semble réalisé : l'abolition des actes violents ou illégaux et , par voie de conséquence, des guerres et de la délinquance. Une fois soumis à un traitement neurologique révolutionnaire, nul ne peut ébaucher la moindre mauvaise action sans voir apparître devant ses yeux son Analogue, représentation fantasmatique mais plus vraie que nature de l'être le plus à même de le stopper d'un seul regard (mère courroucée, séraphin vengeur..). Ainsi chacun vit-il avec une épée de Damoclès dardée vers son esprit, ce qu'illustre magnifiquement la couverture de Siudmak.
Evidemment, un tel procédé, intrinsèquement liberticide, offre une voie royale au cauchemar dystopique.
Dans le premier chapitre, le lecteur est en terrain connu : la théorie est exposée, les principaux tenants et aboutissants discutés.
La suite est plus mouvementée et d'un abord moins aisé. On suit un jeune héros, Candide oppressé par une société consumériste, qui découvre peu à peu l'existence d'une Résistance. Cependant, celle-ci est si obscure et ses méthodes si ambigües qu'il est difficile de sympathiser avec elle. L'intrigue y perd en manichéisme mais, à mesure qu'abondent les motifs qui nous donnent une vision kaléidoscopique de ct univers, elle y perd également en clarté.
A ce stade, le roman ressemble à un récit d'espionnage échevelé; et il est parfois compliqué de ne pas y disperser son intérêt. Heureusement, les fins de chapitres, toujours percutantes, sont d'une bonne aide. Et la conclusion, en forme de boucle, est réussie.
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Au final, si toutes les promesses du départ ne me semblent pas tenues et si l'intrigue aurait gagnée à être épurée, ce court roman reste une dystopie originale qui devrait plaire aux amateurs de curiosités.