Dans un futur proche, sur la côte ouest des Etats-Unis, les franchulats se partagent un territoire où la loi est devenue flottante, le fait d’organisations commerciales plus ou moins criminelles. En ces lieux improbables, vont se rencontrer et s’associer d’improbables personnages afin de déjouer un non moins improbable complot.
Par un concours de circonstances Hiro Protagoniste, dernier hacker indépendant et meilleur sabreur du monde réel et du Métavers, rencontre Y.T., jeune Kourière de quinze ans qui l’aide à livrer sa pizza dans le délai imparti, et à ainsi échapper aux répercussions – désagréables – d’un retard. Les pizza de la Cosa Nostra arrivent à l’heure ou Tonton Enzo vient en personne et immédiatement s’excuser.
Le roman entraîne ses personnages, à peine présentés, dans une loufoque histoire de virus touchant au tronc cérébral, en lien avec la civilisation de Sumer, des dieux Asherat et Enki, et le mythe de Babel.
Stephenson
lie cette notion de virus linguistique à la programmation informatique. Ceci donne corps à un roman touffu qui explose de tous côtés (la multiplication des territoires donne lieu à des descriptions délirantes), en métaphores hallucinantes et jubilatoires."La franchise Nouvelle-Sicile de Compton est un lieu sinistre, qui ressemble à un jamboree de la Mafia junior. Ces jeunes sont encore plus ternes que ceux de la banlise mormone de Deseret. Les garçons ont des costumes noirs sinistres. Les filles ont une gangue de féminité inutile. Elles ne peuvent même pas appartenir à la Mafia junior. Elles doivent s'enrôler dans le corps auxiliaire féminin et servir des macarons aux hommes sur des plateaux d'argent. "Fille" est d'ailleurs pour ces organismes un bien grand mot, situé trop haut sur l'échelle de l'évolution. Ce ne sont même pas des poulettes."
Le samouraï virtuel – Snow crash dans son titre original n’a aucun sens et tient cependant son lecteur - enfin moi en l'occurrence - par l’humour de l’auteur et la maestria avec laquelle il lie des concepts terriblement éloignés. Tout se déroule à un train d’enfer, tel un kourier poné à un semi-remorque. L'allure ralentit bien lors des explications fumeuses religion / virus / contrôle / évolution, mais rien que le fait d'observer les rapprochements improbables auxquels aboutit
Stephenson
empêche l'attention de se relâcher. Abandonnant tout sens critique, je me suis laissée happée par les pirouettes des personnages et leur univers, et captiver par celles de l’auteur lors de ces explications (comment concilier informatique et mythologie sumérienne), euh, on peut ? Ah euh, on dirait que ça ne pose pas problème àStephenson
, alors pourquoi pas ?La fin, seul bémol, n’est pas à la hauteur du corps du roman. Aussi après près de quatre cents pages formant des figures pleines de fantaisie, de fureur et de dérision est-on un peu déçu. Mais on s’en remet.
Rechercher un message dans Le samouraï virtuel serait inutile. Cependant, parce que son auteur porte un regard attentif à la société et au monde, le roman présente la vision d’une Amérique – du monde – morcelée, encloisonnée en petits groupes derrière leurs barrières et leurs systèmes de sécurité (la description de l’enclave des Etats-Unis et des Feds qui y œuvrent avec loyauté est une charge hilarante et virulente contre l’absurdité d’un besoin de contrôle pathologique). L’univers que donne à lire Neal