Ca commence très fort avec l’histoire d’un malade mental qui devient tueur en série, persuadé d’être entouré de méchants Aliens nazis. On voit le monde avec les yeux du tueur malade et les meurtres qu’il accomplit, par ailleurs incompréhensibles à un esprit sain, obéissent alors à une certaine logique.
Vient se greffer une deuxième histoire où un scientifique, qui a mis au point une intelligence artificielle: la neuromatrice (machine "neurocognitive" à tendance schizophrénique, spécialisée dans la recherche de serial killers), se met à traquer un réseau de tueurs assoiffés de sang et de tortures en tout genre dans une ambiance "fin du deuxième millénaire".
Les plus et… les moins
La première partie de l’histoire est excellente. Une idée originale (mais il est vrai que je ne suis pas une polardeuse) soutenue par une écriture efficace. Pas de SF, du polar bien gore pur jus.
La SF apparaît dans la deuxième partie.
L’originalité de cette deuxième partie réside dans l’IA qui recèle un "noyau de chaos actif" et ça, c’est toute la différence avec les IA habituelles (ou du moins celles que "je connais")… car cela lui permet de "prévoir l’imprévisible", en trouvant le lien entre des faits à priori sans rapport les uns avec les autres.
L’idée est bonne. Le fondement de la théorie du chaos, c’est bien d’affirmer que des systèmes au comportement complexe d’apparence désordonnée ne sont pas totalement aléatoires.
Si on n’est pas copain avec le concept de "recombinaison fractale de l’univers", il ne faut pas pour autant lâcher l’affaire, c’est juste qu’on n’est pas encore pas prêt pour comprendre à donf la structure fractale des crimes d’un tueur en série. Pas de honte à avoir : Mandelbrot n’y a, je crois, pas encore réfléchi (*),
Dantec
, si ! :) et il faut parfois s’accrocher pour le suivre.Là où les choses se gâtent un peu, c’est quand l’IA fait sa crise de mysticisme (Au moment où "une sorte d’interpolation chaotique "prend" possession du champ de conscience" (Vous suivez ? :D !) et nous plonge dans une espèce de salmigondis mystique qui s’entrecroise avec une action par ailleurs bien menée toujours servie par un "style
Dantec
" incisif. Le lecteur, tenu en haleine par une histoire aussi violente que glauque, doit alors faire preuve de bonne volonté pour ne pas zapper les passages relevant de cette approche pseudo-mystique et sauter à ce qui intéresse directement l’action…En conclusion
Un roman pas mal du tout. Un polar/thriller mâtiné d’une touche de SF originale et intéressante mais susceptible néanmoins d’en rebuter certains.
Sachez cependant que si les idées de ce bouquin ne vous paraissent pas immédiatement claires, tout espoir n’est pas perdu puisque
Dantec
vous apprendra en effet que vous avez la cervelle quantique. ;DBon sérieusement, scientifiquement parlant, c’est un poil caricatural et on sourit parfois… un peu… quand même…
Pas grave, la SF n’est pas le support de la science. Elle est un support de réflexion et finalement, ce bouquin avec sa plongée dans le gouffre du Mal incite tout de même à une certaine réflexion.
Ce roman a obtenu en 1996 dans la catégorie "Roman" à la fois le Grand prix de l’imaginaire et le prix Rosny Aîné et à mon avis, c'était mérité.
Nota: ce livre s’insère entre La sirène rouge et Babylon Babies. Je n’ai pas lu le premier mais pour avoir lu le second avant Les racines du mal, je peux vous dire que ce n’est pas la chose à faire. Si vous voulez lire cette quasi trilogie, respectez l’ordre, je vous le conseille et n’hésitez pas à lire Babylon Babies, c’est vraiment bon.
(*) Et pourtant notre génial mathématicien ne recule pas devant la difficulté : ne vient-il pas de sortir aux éditions Odile Jacob un livre sur l’application des fractales à la modélisation des fluctuations des marchés boursiers : Une approche fractale des marchés. Risquer, perdre et gagner ?
Comme quoi, si vous voulez faire fortune, replongez-vous dans vos maths ! ;P