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Si ce troisième et dernier tome de To Terra… nous présente un dénouement haut en couleurs, il éclaire aussi le lecteur quant aux véritables tenants et aboutissants de cette Superior Domination et du rôle qu’y tiennent les Mu. Cette conclusion ne se pare donc pas de spectaculaire et d’action pour dissimuler un propos en fin de compte assez vide de sens mais bel et bien pour amplifier la portée de son idée de départ à travers un simple jeu de contraste entre les « effets spéciaux » et les éléments de réflexion que ceux-ci sous-tendent – ce qui à ce stade du récit n’étonne plus de la part d’un auteur que ses inspirations à la fois personnelles et novatrices ont érigé en chantre du mélange des genres ; ici le shônen et le shôjo.
De sorte qu’entre des scènes de combats spatiaux tout à fait réussies par la grandeur de leur échelle et de leur spectacle, on peut distinguer d’assez nettes évolutions des personnages principaux de chaque camp : alors que Keith semble s’humaniser – bien qu’à peine, et surtout trop tard, comme il se doit – dans sa relation avec son sous-fifre Makka, et dans le plus pur style shônen-ai cher à l’auteur de ce titre, Jomy de son côté donne l’impression d’une froideur qu’on ne lui connaissait pas jusque-là, exigeant toujours plus de Tony et de son groupes de Mu surdoués car nés sur la planète Naska – le prix de cette déshumanisation se montrera d’ailleurs élevé lui aussi…
D’ailleurs, on regrette presque que de telles évolutions apparaissent aussi tardivement car il leur reste bien peu de place pour s’exprimer : les Mu enfin parvenus à Terra, le dénouement se précipite presque – à travers un imbroglio de rancunes et de peurs trop longtemps contenues qui explosent soudain – vers les révélations qu’attend le lecteur depuis un certain temps suite aux nombreux questionnements formulés par les divers actants principaux du récit tout au long de celui-ci – et surtout ceux posés dans le tome précédent.
Si ces réponses s’avèrent assez surprenantes, au point de rappeler un effet de chute, elles s’inscrivent néanmoins à la perfection dans cette problématique récurrente du Japon d’après-guerre : la relation de l’humain au technique, à la machine, et, prise dans un ensemble plus spécifique, les liens ambigus qu’entretiennent les japonais à cette Révolution Industrielle que leur a imposé le vainqueur américain en 1945.
Une idée somme toute assez banale et en fin de compte plus que répandue dans le genre de la science-fiction mais qui ici atteint un sommet dans sa représentation des passions humaines – c’est-à-dire des conflits, sel de tous récits – qu’elle implique, voire qu’elle conditionne – pour rester dans un champ lexical fidèle à la Superior Domination.
To Terra… s’achève donc avec grand brio dans sa juxtaposition d’idées et de personnages mais aussi de sens artistique comme narratif : si aucun de ces éléments pris séparément n’apporte quoi que ce soit de bien neuf, c’est leur combinaison qui fait de ce titre une réussite complète.
Avec une mention spéciale pour l’épilogue qui ouvre la conclusion du récit, et surtout l’ensemble de son univers, pourtant déjà bien riche, vers un avenir pour le moins… parapsychique.
Récompenses :
- en 1978, le Prix Seiun – le Grand Prix de la science-fiction japonaise – du Meilleur Manga.
- en 1980, le Prix Shôgakukan dans la catégorie Shônen – alors qu’une autre œuvre du même auteur, Kaze to Ki no Uta, remportait le même prix dans la catégorie Shôjo…
Adaptations :
- Toward the Terra (Chikyuu e… ; Hideo Onchi, 1980), un film d’animation.
- Toward the Terra (Terra e… ; Osamu Yamasaki, 2007), une série TV.