Le paradoxe de l'existence de l'auteur

RG

		Citation : et cette histoire alternative n'est autre que notre histoire...

Pas tout à fait. Si la victoire est bien alliée, les circonstances de fin de guerre sont un brin différentes. Cà se joue à peu de choses mais donne à la version incluse une couche uchronique supplémentaire. Mais il me faut vérifier. Je reviens à ce sujet.
Toujours est-il que cela n'enlève rien à l'explication et complique peut-être même un peu plus les choses.

Je ne retrouve rien de précis dans le roman à la suite d'un survol rapide, du moins le moindre passage concernant mon affirmation, mais le bouquin est si dense que çà n'a rien d'étonnant.

Mais Wikipedia écrit dans mon sens.
Et, Aziza et Goimard dans "encyclopedie de poche de la SF" écrivent:

"Ce n'est pas vraiment notre histoire que raconte ce livre, mais une autre uchronie dans laquelle en 1945 Allemands et japonais sont vaincus et où les Etats-Unis dominent le monde, après le remplacement de Roosevelt par Tugwell, et partagent la Russie avec les Anglais."

Une uchronie dans l'uchronie d'une réalité que l'auteur donne à douter à son lecteur. Du grand art.

Une sorte de mise en abyme, donc.

En effet, le livre qui raconte "notre" histoire dans le récit de K. Dick est en réalité une anticipation de notre histoire. Et c'est normal puisque K. Dick publie son livre en 1962 et que son récit se déroule fin années 70 (je crois...). K. Dick a anticipé sur l'issue de notre guerre froide, car son roman est lui-même une anticipation de ce qui aurait pu se passer si les alliés avaient perdu la guerre. C'est bel et bien une uchronie dans l'uchronie (jolie formule). Et cela participe d'autant plus (il me semble) à l'impression que la frontière entre les personnages et le lecteur est brouillée: l'histoire du roman et l'histoire "mise en abîme" renvoient chacune à une guerre froide. K. Dick anticipe sur une fiction afin d'anticiper sur la "réalité".

Bienvenue, Mykom et RG.

		RG : La "suspension of disbelief" [...] présentée par Coleridge [...] Il y a effacement de l'auteur, mais également effacement du lecteur. Seuls restent quelques traces de leur présence.

Voilà une précision qui me plaît (et me semble importante). J'ai toujours trouvé cette théorie, telle qu'énoncé d'ordinaire, excessive car totalisante (et ne correspondant pas à mon sentiment).

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Pour le reste, je me garderais pour l'instant de disserter avec vous : je manque de patience. ^^


Je cite juste deux fictions que m'évoquais votre discussion :
- sur la dualité personne réelle/personnage de fiction, la sympathique comédie L'incroyable destin d'Harold Crick ;
- sur l'auteur qui se place dans un texte de SF en tant que personnage et narrateur, The last voyage of the Proteus : An eyewitness account of the end of the world de Thomas Disch (le monde en question étant la Grèce homérique au lendemain de la chute de Troie).

Il ne me semble pas que Coleridge présente sa théorie comme quelque chose d'absolu. En réalité, la "suspension of disbelief" pose le fondement de la fiction, mais ce qui intéresse un auteur, ce sont tous les écarts possibles. Et sans la théorie de Coleridge, on ne pourrait pas traiter les cas qui s'en écartent: il a probablement posé la normalité afin de traiter l'anormalité.
Dans presque n'importe quel livre, on peut trouver une remarque anodine qui introduit de l'ironie dans la narration. Cette ironie n'est possible que parce que Coleridge a posé sa règle. En tant qu'auteur, ce qui m'intéresse c'est violer cette règle (et surtout le faire sans me faire choper). Et je pense que c'est ce qu'a voulu faire K.Dick. Dans The Man in the High Castle, c'est tout le livre qui remet en question la "suspension of disbelief" car c'est un livre qui parle d'un livre. Sans Coleridge, le roman de K. Dick ne serait pas aussi génial qu'il l'est (là je force un peu le trait).
En somme, le propre d'une règle, c'est de se vouloir absolue précisément parce qu'elle ne l'est pas. Et les auteurs ne cessent de le montrer en ce qui concerne la "suspension of disbelief".

En effet, j'ai très souvent entendu parler de The man in the High Castle et de ses mérites, mais je ne l'ai toujours pas lu. Je vais le mettre en priorité de mes lectures potentielles.
Maintenant tout ce qui tourne autour de la suspension of disbelief semble bien plus profond qu'elle n'en avait l'air à première vue. Donc, je vais garder ce que j'ai dit en tête, mais avant cela je vais enrichir un peu mes connaissances et lectures ayant un lien avec cette règle. Donc, Jim, je lirai tes suggestions également

		Citation : usque là c'est simple. Mais maintenant, que se passe-t-il si dans mon histoire, Tim met la main sur mes feuilles, et peut lire cette histoire?

Bjr,
Cela a été traité par Daniel Galouye dans Simulacron 3. On peut citer le récent et non encore traduit The Fifth Heart de Dan Simmons dans lequel Sherlock Holmes prend conscience de la nature fictive de son existence.

Trois petits tours et puis s'en va..?
Ce thread semble virer au paradoxe de l'existence du posteur..?