« Seuls mes clients les plus paranoïaques me téléphonent en plein sommeil.
Bien évidemment, personne ne désire qu’un appel sensible soit décodé et affiché sur l’écran d’un vidéophone ordinaire ; même si la pièce n’est pas sous écoute, on peut capter dans tout le voisinage le bruit radioélectrique engendré par l’affichage du message décrypté. La plupart des gens se contentent néanmoins de la solution habituelle : une modification neurale permettant directement le résultat aux centres visuels et auditifs. Le mod que j’utilise, Maître-Chiffre (NeuroComm, 5999$) fournit égalemet un larynx virtuel en option pour une sécurité bidirectionnelle totale… »
L’histoire :
XXIeme siecle, Nick est enquêteur et son investigation a pour nom Laura Andrew. Une fille attardée, sourde et aveugle, qui vit depuis sa plus tendre enfance dans un hôpital, sans histoire ou presque… Les deux premières fois qu’elle s’était échappée de sa chambre, on l’avait retrouvée à quelques kilomètres de là, mais aujourd’hui c’est plus sérieux. Elle a disparu, sans trace de crochetage, invisible aux yeux des caméras. Pourtant elle est physiquement incapable de se déplacer plus loin que sa chambre…
Un OVNI.
A la lecture de la cité des permutants, j’avais pris une grosse claque, je m’étais dit que cet auteur avait un véritable talent. Mais il arrive qu’un auteur écrive un chef d’œuvre et puis… plus rien. C’est pourquoi isolation était pour moi le moyen de confirmer la bonne impression que j’avais eue. Et là … gigantesque claque. Un véritable chef-d’œuvre !
L’histoire.
Ça commence comme un bon polar, en quelque sorte le journal d’un enquêteur essayant de résoudre le mystère d’une disparition somme toute banale, dans un univers où l’humanité a fait un pas de géant : les hommes sont branchés, asservis par l’entremise de mods. Ce sont des extension électroniques destinées à améliorer l’homme, non pas seulement au niveau physique, mais aussi au niveau de la personnalité. Une vraie trouvaille.
Je suis policier en planque et j’ai un mod me permettant d’avoir une attitude plus vigilante, de manière à ne pas être dérangé par des parasites. Il y a les mods de localisation, les mods de recherche… Bref tout un panel pouvant même transformer un être humain en machine froide.
Et ce background : une nuit, le ciel clair et étoilé, la nuit suivante, un noir complet et définitif : la bulle. Cette bulle inexplicable et mystérieuse, événement dont certains mouvements fanatiques s’emparent pour en faire le symbole apocalyptique et destructeur.
La question est pourquoi ? Comme si l’humanité était en quarantaine par rapport au reste de l’univers. Qui est Laura ? Pourquoi a t-elle disparu ?
Réality or not reality ?
Avec ce foisonnement d’idées, on se dit que
Egan
nous a concocté un beau roman. Mais le bougre ne s’arrête pas là. Il va plus loin, dans la réalité et les paradoxes quantiques.J’ai lu ce roman juste après avoir terminé l’homme nu, qui déjà était vraiment orienté physique quantique. L’enigme du chat de Schrödinger est la suivante : si l’on met un chat dans une boîte et que l’on y introduit par un trou une particule dont la probabilité de se désintégrer et donc susceptible de tuer le chat est de 50%, tant que l’on n’a pas ouvert la boîte, le chat peut soit être vivant, soit être mort. Mais on ne saura pas tant que l’on n’aura pas observé ce qui se passe à l’intérieur. La mécanique quantique prévoit que le chat est donc mort et vivant tant qu’on n’a pas observé l’événement, tant que la réduction n’a pas été faite par l’observateur !
D’où découle, en passant les détails, la probabilité d’une quantité d’univers parallèles incroyable, mais réduits à un seul car observés par tous les hommes.
Voir le très complet dossier d'ARN sur la mécanique quantique mécanique quantique.
D’où une fin cataclysmique et superbe, d’où une intrigue exceptionnelle, d’où un chef d’œuvre. CQFD
Extraits :
« Chaque flic a au moins six « mods d’amorçage » standards. P1 àP6, mais c’est P3 qui impose l’état mental approprié au service actif, c’est P3 qui vous rend vraiment amorcé. »
« Ce n’est pas facile à accepter, mais c’est ce que nous sommes. Nous ne sommes pas seulement l’univers qui a « conscience de lui-même » - nous sommes l’univers qui se décime lui-même, par le simple acte d’accéder à cette conscience. »