Wintrebert
n’hésite pas sortir de sf stricto sensu. Mais elle le fait avec autant de talent que pour notre genre de prédilection. « La chambre de sable » en est une preuve supplémentaire.Marie a onze ans. Solitaire et imaginative, elle aime inventer des vies à ses voisins, comme autant de biographies imaginaires. Elle vit avec sa mère, fonctionnaire célibataire, qui déprime de ne pouvoir devenir écrivain. Pour s’évader de sa vie terne, elle peut compter sur Nana. Amie de longue date de sa mère, elle en est l’exacte antithèse. Auteur et illustratrice, elle vit à sa guise, trop heureuse de n’avoir ni enfant ni mari. Ballotée entre ces deux extrêmes, Marie va découvrir en peu de temps la réalité du monde adulte. A commencer par ses hypocrisies, ses petits arrangements et ses mensonges. C’est donc tout le monde de l’enfance, son innocence et ses illusions qui vont voler en éclats.
Que faire alors ? S’y résigner, c'est-à-dire devenir adulte ? Ou bien chercher une échappatoire ? A supposer toutefois qu’il en existe une… à moins de l’inventer ?
L’écriture est fluide mais ciselée. Elle n’est jamais trop guindée, jamais trop adulte. Et c’est là l’une des grandes forces de ce bildungsroman. Combien de fois n’avons-nous pas pesté devant un parler et des préoccupations trop adultes, alors que le personnage est censé être un pré-ado ! On ne peut également manquer d’être frappé par l’atemporalité du roman. On suppose que le roman se passe en 2008, mais il pourrait tout autant se passer dans les années 80 ou 60. Et c’est certainement là l’une des marques des grandes œuvres : arriver à dégager des préoccupations et des expériences universelles de la gangue de leur époque.
A l’heure des cycles interminables et des pavés du NSO, on ne peut que se réjouir de lire des romans concis et denses comme « La chambre de sable » ou « Unica » d’Elise Fontenaille (qui sort en poche dans 15 jours, ne le ratez surtout pas !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!) . Un roman majeur, ni plus ni moins, qui trouvera sa place dans toutes les bonnes bibliothèques, entre « Extrêmement for et incroyablement prêt » de Jonathan Safran Foer (celui là il est en poche, vous n'avez aucune excuse pour ne l'avoir point encore lu), « Les enfants d’abord » de Christiane Rochefort ou « L’attrape-cœur » de Salinger (pareil, il est en poche).
Bref, en un mot comme en cent :
Bravo, et merci encore Joëlle !