Les mémoires retracent le parcours d'un espion dans ce lieu fermé : le soldat vient pour recevoir sa Mission.
Mais il va simp
lem
ent se perdre corps et âme dans un monde kafkaïen, absurde, ubuesque même parfois. Un monde de couloirs tous semblables, aux portes à numérotations incertaines, où vaquent à leurs occupations des secrétaires, des gradés, des espions, des contre-espions, des barbouzes...A moins que ce ne soit des espions qui ne passent pour des gradés, ou des agents doubles, ou triples, ou quadruples.
Et notre héros est bien en peine de mettre la main sur sa Mission, et va, d'ici de là, rencontrant des congénères qui semblent parfois détenir une vérité à la limite du concevable, ou perdre leur vie dans des passe-temps illogiques, ou donner des conseils, tenir des discours irrationnels.
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Tout est code. Voilà qui en rajoute à la confusion. La logique paranoïaque s'en mêle : propos irrationnels, ou duperie, ou incompréhension du héros, ou code, donc propos rationnels dont il faut avoir la clé ? Quel est le sens de ce monde étrange ? Tout est-il absurde ? Une analyse rationnelle de cette dernière hypothèse ne démontre-t-elle pas qu'elle est elle-même absurde, et donc qu'il y a bien un sens caché ? A moins que, parmi toutes les suppositions émises, on ne retiennent celle de la blague magistrale :
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Ecrit avec une dextérité certaine, contenant de nombreux moments mémorables, le livre de
Lem
pourra faire cependant souffrir le lecteur. Tout d'abord parce que ce récit est forcément loin des formes dramatiques qu'on trouve dans les histoires plus "conventionnelles". Ensuite parce que, écrit à la première personne, le nom du héros n'étant jamais avancé, il faut bien reconnaître que d'un certain côté, le héros, c'est nous - et qu'il faut bien nous coltiner cette vision absurde du monde, ce qui reste toujours une chose éprouvante.On pourra peut-être voir éga
lem
ent une certaine vision datant de la guerre froide (le pentagone - dit "l'Edifice" - avec son pendant, l'antiEdifice (qui existe ou n'existe pas), nous et les a-u-t-r-e-s (ces derniers existant ou n'existant pas, à moins que les autres ce ne soit nous, ou encore...), les espions, la paranoïa omniprésente, une bureaucratie surréaliste, bref, un beau foutoir sans but, retranscrit, brossé, démonté.Mais ne nous y trompons pas.
Lem
vise sans doute plus loin, plus profond. Il se place donc au côté des écrivains de l'absurde avec ce livre qui nous montre, encore une fois, la maîtrise de l'auteur.J'avoue que pour l'instant, au cours de mes quelques lectures,
Lem
ne démérite pas. Quelques autres m'attendent, et je parie fort que je ne serais pas déçu. Il devient, à mes yeux, un des auteurs les plus intéressants dans les rangs des SF writers.---------------------------------------------------------------
j'ajoute une petite remarque qui n 'a sans doute aucune valeur, mais qui me titille alors que je fais la vaiselle...
Ces mémoires sont une découverte d'une civilisation humaine future. Cet effet est peut-être un moyen d'inclure ce livre dans le genre qui nous intéresse. D'un côté, il n'y avait pas obligation, et le livre aurait peut-être pu donner une oeuvre absurde pure - avec beaucoup de remaniements, donc à voir... mais d'un autre côté, le lecteur est en place autant du héros que du lecteur du futur lisant les mémoires retrouvés. Il se glisse alors à la lecture (d'une façon absurde, en un sens, ou plus ou moins inconsciente) que l'absurdité même du récit n'est pas sans relation avec le jugement qu'on pourrait avoir à posteriori - et dans un temps éloigné - sur l'humanité telle que nous la connaissons - et notamment celle du XXème...
Quelque chose comme ça...
Bon faites comme si j'avais rien dit...