Reste à savoir, après lecture, combien de générations nous avons en réserve :)
'Tous à Zanzibar' est l'Incontournable de la dystopie.
Comme le disait Stan Barets : "1984 ou le meilleur des mondes ressemblent, à côté, à des rêves de jeunes filles"
Mais se faire peur n'est pas la seule raison de lire
Brunner
. Personnellement, je classerais ce livre au top de mes lectures SF. A mon grand regret, car, inconditionnel de PKD, j'aurais voulu y voir mon auteur favori. Trois raisons m'amèneraient à faire ce choix :1. Le travail de recherche fabuleux de
Brunner
lui fait décrire son futur avec une précision quasi prophétique. Certes, il y a quelques erreurs (et tout n'est pas encore arrivé :). Mais par exemple : les manipulations génétiques cotoient l'eugénisme. L'URSS n'est plus une puissance mondiale, mais la Chine est le nouvel acteur international. Certains restent scotchés devant leur poste de télévision, pendant que d'autres deviennent soudain des tueurs fous, explosant sous la pression sociale. Une société américaine veut racheter un état africain (notons qu'un récent classement des 100 plus importantes unités économiques mondiales (ou la france est cinquième) classe désormais certaines multinationales américaines (Exxon 45ème) comme plus riches que certains états.) etc...2. Mais
Brunner
ne se contente pas de faire un listing froid du futur. Ecrivain avant tout, il n'oublie pas de donner à ses personnages une profondeur certaine, ni de développer des intrigues captivantes. Parmi les héros principaux, on peut citer : Norman House, cadre afro-américain de la General Technik, envoyé par la société pour racheter le Beninia, l'état africain sus-mentionné. Donald Hogan, un espion qui s'était un peu oublié, appelé pour tuer Sugaiguntung, chef du projet eugéniste Yatakangais. Shalmanezer, l'ordinateur de la General Technik, dont on dit qu'il accède à la conscience. Chad C. Mulligan, sociologue, un des rares à garder une étincelle d'humanité, et qui écrit des livres acides, dont on peut lire des extraits (livres dans le livre). Et croyez bien que ce n'est là que la partie émergeante de l'iceberg.3. Le style est le troisième élément qui finit de faire de ce livre un must absolu. Inspiré de Dos Passos, l'écriture de
Brunner
n'est pas que brillante. Elle utilise une structure de coupage/collage, proche d'un cut-up cinématographique, qui permet àBrunner
d'alterner les chapitres concernant les personnages principaux avec des passages d'actualités, des scènes de vie quotidienne, des extraits de rapports de commissions, des poèmes, etc... Une forme excellement adaptée au projet deBrunner
: décrire un monde. Et si la SF c'est ça avant tout : projeter le lecteur dans un monde autre, qui reste, au final, le véritable personnage du roman,Brunner
se pose là en maître incontestable.Voilà. Je n'en dirais jamais assez. Si vous n'avez pas encore lu ce livre, courez l'acheter, l'emprunter, le voler, tout ce que vous voulez. Si vous n'arrivez pas à entrer dedans, patienter, revenez-y... Je finirais par une citation de Chad C. Mulligan :
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note : Prix : - HUGO 1969 - APOLLO 1973 - BRITISH SF 1970