ici, " Une femme sans histoires " est le deuxième
Priest
qui me laisse un peu de dubitatif. Décevant certes mais pas absolument dénué d'intérêt puisqu'il initie à mon avis l'une de ses plus belles réussites qu'il écrira 14 ans plus tard à savoir " La Séparation " tout en reprenant les thèmes de la création littéraire et de la mémoire déjà au centre de " La fontaine pétrifiante " roman fascinant s'il en est.Un pont malingre entre deux oeuvres phares voilà l'ennui...
L'histoire, comme souvent chez
Priest
, est faussement simpliste.Alice Stockton vit seule dans une petite bourgade du Wiltshire au sud de l'Angleterre. Elle se bat aux côtés de son agent littéraire afin de publier son manuscrit saisi pour une raison qu'elle ignore par le Ministère de l'Intérieur britannique. C'est alors qu'elle apprend qu'Eleanor Hamilton, sa voisine et amie elle même écrivain est découverte assassinée.
Le fils d'Eleanor un certain Gordon Sinclair arrive pour les obsèques et s'immisce peu à peu dans la vie d'Alice. Qui est-il et qui était Mme Hamilton qu'Alice croyait connaître ? Voilà la trame.
Vous me direz que le lien avec la Séparation n'est pas évident évident et pourtant il est bien réel.
Tout d'abord " une femme sans histoires " est une uchronie. C'est vrai qu'elle n'est pas franche du collier celle-là mais je ne pense pas que dans mon monde à moi l'usine de retraitement de la Hague ait eu un " incident " type Tchernobyl qui aurait contaminé fin 1980 une bonne partie de notre territoire national et le sud de l'Angleterre. Ou alors la COGEMA, la DST, la DGSE et les services secrets britanniques sont vraiment très forts. Non vraiment, c'est bien une uchronie.
La structure du récit relève elle aussi du même procédé que celui employé dans " La Séparation ". La vie d'Alice est ainsi entrecoupée de lettres, de souvenirs d'enfance, de portions de vie, de rêves aussi peut être. Rien n'est bien clair. Les pistes se brouillent, la réalité et l'a-réalité sont indiscernables et le lecteur se perd tant il est manipulé.
Priest
complète le trouble du lecteur en jouant sur les noms de jeunes filles, sur les pseudonymes, les diminutifs...Malheureusement alors qu'on arrivait tant bien que mal à faire la part des choses avec la vie des frères J L Sawyer (Joe et Jack) de la Séparation, là où on applaudissait devant la technique narrative de
Priest
, ici le seul sentiment qui demeure quand on a tourné la dernière page reste la confusion rien que la confusion.Il n'en demeure pas moins que
Priest
est bourré de talent et qu'il sait comme personne nous faire aimer les paysages qu'il anime. Le roman regorge ainsi de ces petits bouts d'Angleterre qu'il essaime avec bonheur tout au long de ses récits...On y découvre à travers Eleanor Hamilton un
Priest
engagé. Engagé auprès du CND notamment ( campagne pour le désarmement nucléaire). Il nous fait découvrir également les GV (gardes volontaires) un service civil à temps partiel né pendant premiers mois de la Seconde Guerre mondiale et qui avait pour vocation d'assister la police. Ce service connut bien vite quelques dérives fascisantes.Et comme toujours