Ce volume couvre une période essentielle dans la vie artistique de Dick.
Il a derrière lui tous ses romans mainstream avec lesquels il essaie de se faire un nom hors sf, dont aucun ne trouve immédiatement preneur. Seul ses Confessions d’un barjo trouveront –tardivement- un éditeur anthume, sur les 7 romans écrits entre 1955 et 1960. C’est donc au cours de cette période qu’il se tourne définitivement vers la sf : le maître des illusions achève de perdre les siennes et prépare les nôtres.
Période cruciale donc. De retour à la sf, Dick va jouer à cette période sur tous les tableaux : uchronie (Le maître du Haut-Château), post-apo (Dr Boodmoney), voyages dans le temps et paradoxes temporels (Dr. Futur, qui est aussi un retour à Van Vogt), invasion ET (Les joueurs du Titan), robots (Le bal des schizos) ainsi que la conquête martienne sur fond de surpopulation (Glissement de temps sur Mars).
Dick va même jusqu’à s’aventurer vers les terres du polar, entre hard-boiled et whodunit (Le bal des schizos, Les joueurs du Titan), sans toutefois franchir le Rubicon. Dommage, car cela aurait vraiment pu donner de bons polars, plutôt que de la mauvaise sf. Non content de marcher dans les pas de Bester et Asimov, il va tenter également une fusion entre mainstream et sf, signant même là l’un de ses meilleurs romans : Glissement de temps sur Mars.
Les années 60 : une décennie qui commence mal...
Comme tant et plus d’auteurs professionnels, Dick a parfois dû écrire vite et beaucoup, pour faire bouillir la marmite. Et là, mauvaise nouvelle : ce recueil s’ouvre avec deux de ses pires romans ! Commençons donc par le début, là où le bât blesse.
Et ça commence en fanfare, avec Les marteaux de Vulcain. Alors là, comment dire ?
N’y allons pas par quatre chemins : on touche vraiment le fond. L’intrigue se résume très facilement : après une Troisième guerre mondiale catastrophique, l’humanité a –enfin- choisi de s’assagir. Notre espèce s’est donc mise d’accord pour être supervisée par un super-ordinateur, Vulcain, troisième du nom. On lui fournit les données sur la situation politique, et c’est lui qui prend la décision. La Terre est divisée en grandes zones géographiques (quelques-unes par continent), dirigée par un secrétaire. Il ne de rend comptes qu’à son unique supérieur direct, le Secrétaire général, la seule personne à communiquer avec Vulcain. Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes pacifié, s’il n’y avait les Guérisseurs, une rébellion qui conteste cette hégémonie. Un groupe encore relativement marginal, faiblement nuisible, jusqu’au jour où l’on pense qu’ils ont une taupe du côté des secrétaires, voire du secrétaire général lui-même !
Voilà en gros de quoi ça cause. Et je ne vous parle que de l’ordi : je n’ose aborder ses marteaux, sans doute par respect et admiration pour l’auteur du Temps désarticulé. Car il y a VRAIMENT de quoi se gausser. La couverture originelle de cet Ace book ainsi que celle de la première édition allemande disent tout.
D’après Etienne Barillier, Dick a surtout écrit ce roman pour se rappeler au bon souvenir des éditeurs de sf, et du fandom. Quoiqu’écrit soit peut-être impropre : sans doute faudrait-il écrire « commis », tant ce roman est une sombre merde. Pas un nanar, mais un navet, un vrai. L’un de mes pires souvenirs de lecture avec Le colosse anarchique, Le Livre de Ptath ou Neuromancien. Mais pourquoi est-ce si mauvais ?
Parce que le background est torché à la va-vite. Parce que les personnages sont tout aussi torchonnés. Parce que l’intrigue est salopée au possible : les révélations vous tombent dessus comme une merde de pigeon. Non vraiment, il n’y a rien, vraiment rien, absolument rien à sauver. Alors que pourtant, les idées n’étaient pas mauvaises, et cette réflexion assez pertinente sur l’emprise de la technologie qui rogne le libre-arbitre, si elle avait été creusée, aurait pu donner quelque chose d’intéressant. Tout comme cette idée d’une emprise progressive de l’informatique, où l’homme est dominé par ce qu’il crée, comme dans la religion ou l’économie. La servitude volontaire, plus encore que l’oppression, est une idée intéressante, qui aurait gagné à être creusée, tout comme le poids de l’endoctrinement. Autant d’idées qui auraient pu rappeler Orwell ou Reich.
Zelazny avait su écrire un magnifique nouvelle avec le même type d’ordinateurs (cf. son Livre d’or), tandis que Dick signe l’un de ses pires romans. Mais au moins a-t-il eu le courage de le signer sous son vrai nom, contrairement à Calvin M. Knox et tant d’autres.
Ensuite, c’est Docteur futur. Parti de si loin, peut-on dire que les choses s’améliorent ? Disons que l’on a plutôt du moins pire que du mieux. Un Van Vogt vite et correctement exécuté. Cela ne manquera donc pas de plaire aux fans d’Alfred, bien plus qu’à ceux de Dick. Car franchement, il n’y a rien, ou (presque) rien de dickien dans ce roman.
Prenez un toubib californien du début de notre XXIe siècle, sans rien nous dire de cette période, ou si peu. Et transportez-le quelques lignes plus tard, ex abrupto, une poignée de siècles plus tard. Dick nous décrit assez bien la surprise, puis le décalage entre notre toubib et sa nouvelle époque. Pas le même langage, pas les mêmes accoutrements : imaginez quelqu’un habillé et parlant comme François Ier débarquant à notre époque, et vous aurez une petite idée dudit décalage. Et surtout pas les mêmes coutumes, qui deviennent vite aberrantes. Dès lors, tout s’emballe, l’action part à 100 à l’heure sans temps mort, et l’on voyage à travers les époques, voyages qu’il est difficile de résumer sans spoiler, mais les fans de Nathan Drake seront heureux d’y retrouver l’illustre Francis éponyme. Inutile de chercher ici des interrogations sur la réalité, des vertiges paranoïdes et autres abîmes schizophrènes. Tout au plus trouverons-nous quelques vagues altérations du présent via les voyages dans le temps, mais vraiment rien de plus, ce qui est fort peu.
Au final, nous avons un roman efficace, dépaysant et surtout trépidant. Sans temps mort, c’est un roman alimentaire parfaitement assumé, où l’auteur fait son boulot, sans excès de zèle. Publié en poche par Ace books en duo avec Les négriers du cosmos de John Brunner, nous avons là l’équivalent d’un bon FNA d’époque.
Pour les trombines des couvrantes, c’est là :
http://www.pkdickbooks.com/SFnovels/drfuturity.php
NB : A partir de maintenant, j’ai préféré respecter la chronologie d’écriture plutôt que l’ordonnancement du recueil.
De ces nadirs, on passe sans transition au zénith avec Le maître du haut-château, absent de ce recueil. Après ce succès, Dick écrit deux romans en un mois, dont le meilleur du recueil, l’un de ses préférés, et à juste titre : Glissement de temps sur Mars.
Pour les couvrantes :
http://www.pkdickbooks.com/SFnovels/Martian_time-slip.php
La Terre, surpeuplée et donc archipolluée, espère que Mars pourra la délester de son intempérance démographique. La planète rouge voit donc ici et là quelques colonies humaines, cohabiter non sans mal avec les Bleeks, derniers représentants d’une civilisation martienne à l’agonie. L’eau est rare, la vie est dure et le confort très limité. Attachée à l’autarcie martienne, l’ONU fait en sorte de n’importer sur Mars que le strict nécessaire. Les produits de luxe, gastronomiques ou autres, passent donc par le marché noir. Dans cette économie autarcique et pauvre en ressources, on produit peu, et l’on répare beaucoup. C’est d’ailleurs le boulot de Jack Bohlen, chargé de réparer à peu près tout ce qui peut tomber en panne. Ancien schizophrène, presque tout le temps en déplacement professionnel, il s’occupe comme il peut de sa petite famille.
Autre personnage important : Arme Kott. Leader du syndicat des plombiers, c’est surtout un mafieux sybarite, qui trempe dans tout un tas de trafics. Un Jimmy Hoffa rompu aux rudes conditions martiennes imaginées par Dick.
Troisième et dernier personnage principal, Manfred Steiner, jeune adolescent autiste doué d’un pouvoir de précognition. Il ne communique pas avec autrui, et reste hanté par ce que sera sa vieillesse : agoniser dans un hospice délabré, parfaite image de l’échec à venir de la colonisation humaine de Mars.
Kott va chercher à utiliser la précognition de Steiner afin de monter des magouilles immobilières. Quitte à acheter des terrains dans ce vaste désert, autant miser sur ceux dont la valeur va exploser. Pour communiquer avec lui, il fera donc appel à Bohlen. Mais à trop vouloir user de la précognition, on en arrive vite à altérer le présent…
SF or not SF ?
Ce qui frappe dans ce roman, c’est que la sf se réduit presque exclusivement au décorum. Le Tahiti du Supplément au Voyage de Bougainville de Diderot n’est pas de la sf parce qu’il reste sur Terre, tandis que Dick se situe sur Mars. Voilà pour ce qui est de la sf, la rencontre des autochtones découlant de la localisation du lieu : des homo sapiens sapiens à Tahiti, des Bleeks sur Mars. Une planète rouge peu différente de la Terre de l’époque du roman, tant elle rappelle la banlieue résidentielle de l’American way of life, quoique bien moins prospère, et surtout aux ressources bien plus rares. Sans doute s’agit-il là de la seule –et mince- concession scientifique de Dick. En effet, son approche de l’autisme reste très marquée par l’époque, et même totalement dépassée, tant elle est embourbée dans la psychanalyse. C’est bien là le seul point, particulièrement mineur, sur lequel ce roman accuse un tant soit peu son demi-siècle. Mais bon, Dick n’étant pas un auteur de hard-science, on lui pardonnera sans problème.
Des maladies, venons-en aux malades et aux autres. Comme souvent avec Dick, on passe d’un personnage à l’autre. Et c’est sans doute l’une des forces de ce roman : jongler entre personnages sains d’esprit d’un côté, un ancien schizophrène et un autiste hanté par ses visions d’un avenir rongé par l’entropie de l’autre. Tous ses esprits sont liés entre eux malgré tout, et est certainement l’une des réussites majeures de cet excellent roman. Ecrit dans la foulée du Maître du Haut-Château, il peut supporter sans rougir la comparaison. Dick disait que Glissement de temps sur Mars était l’un de ses préférés, et nous ne pouvons qu’être d’accord.
On retrouvera aussi quelques idées en commun entre ces deux romans, notamment la question de l’eugénisme, et un philosémitisme, déjà présent dans celui-là mais plus accentué encore dans celui-ci.
Puis vient Le bal des schizos.
Pour les couvrantes :
http://www.pkdickbooks.com/SFnovels/We_can_build_you.php
Il aurait dû être publié juste après Le maître du Haut-château, mais voilà... Il a plus que déconcerté les éditeurs, qui ne le publieront que quelques années plus tard. Ce roman est un peu l’okara de Glissement de temps sur Mars. Les deux romans ont été écrits le même mois : il est assez difficile d’en démêler la chronologie d’écriture.
Un inventeur crée des simulacres robotiques des acteurs majeurs de la Guerre de sécession, dont Lincoln. L’idée enthousiasme un magnat, qui y voit une idée intéressante pour éviter que ses colonies lunaires ne virent au fiasco. Voilà grosso modo le résumé du roman.
De cet étrange roman, même. On a l’impression que Dick est parti d’une idée de départ assez mince (créer des ersatz robotiques des personnages majeurs de la Guerre de sécession, ressouvenance de son admiration pour Autant en emporte le temps ?), à quoi il ajoute une couche sur la folie et l’intolérance de la société (la fameuse okara). Autant le roman précédent offrait une belle cohérence, autant celui-ci est plutôt fait de bric et de broc.
On trouve ici ou là quelques idées originales, telles que recycler un poncif (les robots), s’aventurer vers le polar (polar + androïdes, mais nous ne rêvons pas encore de moutons électriques). D’autres plus évoquées que développées (la conquête lunaire).
Dick les agence à la va-comme-je-te-pousse, sans trop savoir où aller, et finit par retomber sur ses pattes. Parce que Dick a du métier, et qu’il est capable de créer une ambiance très étrange, basée sur une légère anticipation, et surtout une bonne dose de paranoïa, le tout saupoudré de roman noir (la femme fatale… aux cheveux noirs). Le tout nous donne au final un roman attachant, notamment par sa sensibilité un peu gauche et son ambiance.
Venons-en maintenant au Dr. Bloodmoney.
Pour les couvrantes :
http://www.pkdickbooks.com/SFnovels/Bloodmoney.php
Second docteur de cet omnibus, c’est aussi plus convaincant.
On commence dans une Amérique légèrement futuriste, qui rappelle plus celle de la fin des 50’s que notre époque ultra-connectée. Dick y installe une belle pléthore de personnages, (presque) trop, même. Ça commence comme du roman mainstream, avec la vie quotidienne de l’American way of life. Cette partie du roman est assez réussie : elle rappelle (comme les romans mainstream de Dick) Sinclair Lewis, John Cheever ou encore John Updike, par leur peinture réaliste et surtout sans fard. Puis on bascule dans la sf, avec une guerre atomique. Exploit peut-être plus pompier que vain, Dick multiplie les points de vue sur la bombe, en jonglant avec sa pléthore de personnage, dont un phocomèle ayant un don inné pour tout réparer. Dans cet empilement décevant, nous sommes hélas bien loin des virtuosités de Glissement de temps sur Mars.
La bombe et ses conséquences vont bien sûr bouleverser les divers quotidiens. Si la plupart des personnages seront perdants, elle fera un grand gagnant : le phocomèle, qui va jouir de pouvoirs télékinésiques, en plus de son don de réparation, assez utile dans un monde post-apo.
Comme pour Le bal des schizos, Dick a ici ou là quelques idées intéressantes, mais il ne prend pas la peine de les développer. L’évolution de son phocomèle, avant et après la catastrophe aurait pu donner une réflexion fascinante sur le pouvoir naissant d’un aspirant potentat, mais il n’en est rien. On reste à la surface des choses, et ce sont d’avantage les évènements que les personnages qui font avancer les choses, contrairement à son Glissement de temps sur Mars.
Cette ultime tentative de fusionner mainstream et sf n’apporte vraiment pas grand-chose. Certes, Dick explore les classiques de la sf, et s’essaie au bon vieux roman catastrophe. Mais rien n’emporte vraiment l’adhésion ni l’admiration du lecteur, comme a su le faire Ballard avec ses quatre romans post-apo (enfin surtout les trois réédités).
Car pour être honnête, Dick n’apporte pas grand-chose au roman catastrophe. S’il a su transcender l’uchronie, il rate la marche du roman catastrophe, sans que cela ne soit vraiment catastrophique. Plus fade qu’atypique, Dick n’est presque nulle-part dans son roman : on se dit que n’importe lequel de ses contemporains aurait pu l’écrire. Peu représentatif de son auteur, il ne lui apporte finalement ni gloire, ni déshonneur.
Un roman que l’on recommandera surtout à qui :
- voudrait découvrir la sf sans se prendre la tête ni croiser de petits hommes verts,
- parfaire sa culture dickienne,
- s’intéresse à la guerre froide et/ou au nucléaire en sf.
Quitte à lire un excellent roman sur le sujet, ruez-vous sans tarder chez Robert Merle.
Last but not least, Les joueurs du Titan.
Les couvrantes :
http://www.pkdickbooks.com/SFnovels/Game_players_of_titan.php
Après une guerre catastrophique (irradiations massives par satellites : pas de bombes), la population humaine est devenue presque entièrement stérile, gink de fait. Cette bonne nouvelle écologique n’est pas la seule : la guerre a aussi permis de faire apparaitre des humains aux pouvoirs mentaux, tels que télépathes et précogs, capables d’entrevoir l’avenir.
Affaiblie par cette terrible guerre et ses conséquences, l’homo sapiens a dû en affronter une autre dans la foulée, contre les Vugs. Cette guerre perdue d’avance a eu le mérite d’éviter le carnage et autres séquelles habituelles. Les Vugs ne viennent pas de la planète Vuguie, mais de Titan, et communiquent par télépathie.
Pour lutter contre la stérilité, les couples sont régulièrement tirés au sort, et l’on change assez souvent de partenaires. Ajoutez à cela un jeu étrange, mi-Monopoly mi-Poker, qui permet à ses joueurs de miser, puis gagner ou perdre de vastes pans de la Terre.
On sent que ce roman a été assez vite écrit, mais il est loin d’être loupé. C’est même un très bon roman mineur de Dick.
Il reprend là encore une thématique polar, puisqu’il s’agit de démasquer un meurtrier parmi 6 joueurs. Sauf que personne ne se souvient de rien, et que les télépathes confirment cette curieuse amnésie partielle. Sans trop dévoiler l’intrigue, on peut noter que petit à petit, la réalité va se déliter, voire se dissoudre, dans une ambiance parano qui n’est pas sans rappeler l’excellent Dark city.
Ce Cluedo post-apo va donc peu à peu glisser dans une paranoïa des plus angoissantes. La thématique du jeu est bien plus maitrisée que dans Loterie solaire, car Dick a maintenant du métier. Il sait mener son intrigue de whodunit, créer et creuser ses personnages, et surtout jouer à plein sur l’ambiance, qui reste la réussite majeure de ce roman robuste. Un roman qui peut laisser un goût amer en bouche à certains : il est vraiment dommage que Dick n’ait jamais tenté sa chance du côté du polar. La sf aurait peut-être perdu quelques romans alimentaires, mais le polar y aurait assurément gagné un auteur prometteur.
Au final, nous avons là un volume charnière, celle où Dick bascule définitivement dans la sf, et où, entre œuvres alimentaires et explorations littéraires, il cristallise ses grands thèmes. Le recueil intégral intéressera les dickiens purs et durs : il permet de voir jusqu’où Dick a pu descendre…
Quant aux autres, je leur conseille sans hésiter un achat sélectif des romans plutôt que cette intégrale, qui présente tous les travers du genre.
Contentez-vous plutôt de la substantifique moelle : Glissement de temps sur Mars et Les joueurs du Titan. Quant aux plus curieux, qu’ils n’hésitent pas à tenter l’aventure du Bal des schizos.
Pour conclure, n s’étonnera d’ailleurs au passage qu’aucun, absolument aucun des romans du ci-devant volume n’ait décroché un prix. Il en sera –hélas- de même pour d’autres grands romans, tels Ubik, Le dieu venu du Centaure ou encore Blade runner. Même chose pour les nouvelles, alors que Dick excelle dans la forme courte. Certes, le Nebula sera créé quelques années plus tard, et la plupart des autres prix dans la décennie suivante… n’empêche que Dick n’en remportera finalement que bien peu ! On ne pourra donc que déplorer une regrettable cécité, voire un certain passéisme pour le Hugo.
Pour ne rien dire de la cécité de la littérature générale, mais ça, c’est une autre histoire…
PS : si je n’ai pas parlé de la préface de Klein, c’est parce qu’elle est très largement hors-sujet, en plus d’être confuse, sans aucun plan ni fil directeur. On navigue à vue entre élucubrations freudiennes et gloses et exégèses de la crise mystique de 1974. Klein parle tout de même de l’œuvre de Dick, mais préfère surtout parler d’autres romans, ce qui ne fait pas vraiment avancer le schmilblick.
Et quand il revient à la bonne époque, il est là encore loin de me convaincre : quel lien entre Dick et le pop art ? A part la contemporanéité ? Le pop art me parait plus pertinent pour Ballard. S’il fallait étudier les liens entre un art et Dick, ce serait plutôt la musique, notamment classique. Elle est particulièrement présente dans Dr. Bloodmoney, il y a une fabrique d’instruments de musique dans Le bal des schizos. Rien non plus sur ses influences littéraires, alors que l’on sait que Dick était un grand lecteur, notamment du réalisme français ou de Proust. Rien non plus sur l’American way of life, et notamment son urbanisme, que Dick prendra plaisir à bombarder (Dr. Bloodmoney) ou à transposer sur une Mars aride pour y faire glisser le temps, en y remplaçant l’atroce massification de la voiture par l’hélicoptère, à jouer dans Les joueurs du Titan, à étendre et densifier dans Dr. futur.